LA CHASSE AUX BALLONNETS  

Souvent, pour corser la séance, il y avait une chasse aux ballonnets, lancés au-dessus du terrain par l'un de nous. Tous les autres fonçaient dans le tas pour essayer de rejoindre les ballonnets en vol. C'était extrêmement spectaculaire mais aussi extrêmement dangereux.
Si les ballonnets avaient été gonflés à l'hydrogène, ils seraient montés et les spectateurs n'auraient plus rien vu au bout de peu de temps. Gonflés à l'air, ils seraient descendus lentement et nous aurions eu le temps de les cueillir à une altitude raisonnable. Mais la plupart du temps ils étaient gonflés au gaz de ville, pour plus de facilité, de sorte que nous devions faire presque du rase-mottes. Et quand il y avait plusieurs avions, les risques de collision étaient grands... Nous avons eu plusieurs tués, et la chasse aux ballonnets a fini par être interdite. Il nous arrivait tout de même de passer outre l'interdiction. Pour faire plaisir aux spectateurs... et pour corser la recette.
Source  Souvenirs irrévérencieux par Adrienne Bolland qui commence ainsi:
Je vous raconterai peut-être un autre jour comment je suis venue à l'aviation, comment une petite bonne femme de rien du tout est devenue pilote: c'est une longue histoire. Aujourd'hui, il s'agit des meetings. Vous ne m'en voudrez pas si j'en parle à bâtons rompus, au hasard de mes souvenirs. Je ne suis pas un historien... il faudra vous faire une raison.
Ainsi, je ne me rappelle plus au juste où et quand j'ai fait mon premier meeting. En tout cas, c'était très tôt: tôt après la Grande Guerre, tôt dans ce qu'on ne pouvait même pas encore appeler ma carrière. J'avais peut-être quelques dizaines d'heures de vol à ce moment-là, et je sais bien qu'aujourd'hui cela ne paraîtrait pas très sérieux: à l'époque, quand on n'était pas un as de la guerre de 1914, on volait quand on pouvait. Moi, j'avais sans doute eu la chance d'être une femme. Pour Caudron, c'était une bonne publicité....