Nous étions en train, ce soir-là, de déblatérer, une fois de plus, contre la timidité des Fritz, quand Casaneuve, qui contemple la piste, s'écrie :
- Mais, regardez ! Regardez donc ! 
De la Poype :
- C'est un de la 4e.
- Le petit Challe qui nous dépucèle ! 
Challe vient d'achever un tonneau lent (pauvre Foucaud !), signe de victoire. On court à lui, qui atterrit. Très modeste :
- J'espère qu'il me sera homologué. Il est tombé dans nos lignes. 
Toute son escadrille le congratule. Son frère, le capitaine, l'embrasse. Igor se prépare à filer en Jeep recueillir confirmation.
- Et le patron qui ne sait pas encore ! 
Pouyade s'amène justement. Il n'a pas sa tête ordinaire. Il hésite, puis fait un signe à Challe le capitaine. Challe junior est appelé à eux. Il bombe légèrement la poitrine. Puis, on le voit de loin se désarticuler, on dirait. Il recule d'un pas. Le Colonel le laisse. Le jeune Challe semble frappé de la foudre. L'aîné vient à pas lents vers nous :
- Un Yak ! Paraîtrait que c'est un Yak ! 
Vers le soir, le Colonel, encadré des Anciens, se rend au P.C. du 18e pour assister aux obsèques de l'as soviétique aux huit victoires, le lieutenant Archipov.
Le désespoir silencieux du jeune Challe. Ses yeux rouges. Personne ne lui souffle mot de son malheur. Le même soir, il revient trouver Pouyade, se propose comme volontaire pour n'importe quelle mission mortelle.

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