9 victoires 

Fernand Bonneton est né le 10 mai 1890 à la Coucourde (Montélimar), Drôme.
Il s’engage en Septembre 1908 dans la Cavalerie (12ème régiment de Dragons) et, en 1914, débute la guerre dans cette arme.
En 1915, il est promu sous lieutenant et demande sa mutation dans l’Infanterie (82éme régiment). Il se bat en Argonne – où il rencontre sa future épouse, Elisabeth Weiser. Il totalise alors 4 blessures. La 4ème le rend inapte aux combats terrestres et il demande alors à aller dans l’Aviation.
Il fait un stage de formation à Juvisy et Châteauroux et obtient son brevet de pilote, sur Caudron G3, le 15 Septembre 1916. Parmi d’autres missions, en 1917, il se distingue en Roumanie comme instructeur et pilote de chasse. En 1918, il demande à rejoindre son vieux compagnon d’armes du début, le Commandant Houdemon à l’escadrille 69 de la 10ème armée. Après l’armistice franco-Allemand, il repart se battre en Pologne et y reçoit une 5ème blessure. En 1920, Capitaine, il rejoint enfin le 1er régiment d’Aviation à Thionville. Il prend bientôt le commandement du 3ème groupe (4 escadrilles).

En Juin 1922, Il est chargé, avec 5 de ses camarades, de représenter la France au meeting international d’Evere ( Bruxelles), avec des Nieuport 29. Le 24 Juin, il se tue, lors d’un concours de ballonnets.

Sa dernière citation, la 12ème, résume toute sa carrière :
" Magnifique soldat, deux fois blessé, deux fois cité dans la Cavalerie. Deux fois blessé, deux fois cité dans l’infanterie. Inapte à cette arme et passé dans l’Aviation, y a reçu une nouvelle blessure, 7 citations et abattu 9 appareils ennemis ".

http://www.theaerodrome.com/aces/france/bonneton.php 

MORT du Capitaine BONNETON EVERE 24 juin 1922 

Dans le courant de l’après midi du samedi, commença un concours de ballonnets. D’un point du champ d’aviation, on lâche deux ballonnets tandis que d’un point opposé s’élève aussitôt un avion que le pilote dirige vers les ballonnets dans l’intention de les détruire.  
C’est au cours d’un exercice de ce genre que le regretté Capitaine Bonneton s’est tué.  
Le brillant officier, pilotant l’appareil 43, venait de détruire un ballonnet et s’élançait à la poursuite du second quand l’accident se produisit.
On se porta immédiatement au secours de l’infortuné Capitaine qui gisait inanimé au milieu des débris de l’appareil. Transporté à l’infirmerie de l’aviation civile, l’aviateur reçut les soins les plus empressés du docteur Brabant qui constata que le blessé avait une fracture à la base du crâne et les deux jambes brisées .Il fut transporté à l’hôpital militaire et mourut dans la soirée, malgré tous les soins qui lui furent prodigués.  
Le capitaine Bonneton était un héros de la guerre, officier de la Légion d’Honneur et titulaire de douze citations à l’ordre du jour de l’armée française. Il commandait actuellement l’escadrille de Thionville. Madame Bonneton se trouvait sur le champ d’aviation au moment de l’accident ; elle accourut immédiatement au chevet de son mari. Ancienne infirmière au front pendant la guerre, elle ne voulut pas quitter le blessé malgré les prières des assistants. Elle ne se sépara de lui qu’au moment du transfert à l’hôpital.

 

HOMMAGE du Général HOUDEMON à Fernand BONNETON 

L’Aviation Française, le 24 Juin 1922, a fait une perte irréparable. La mort du Capitaine Bonneton la prive non seulement d’un pilote de guerre, dont la valeur s’était affirmée dans tous les combats et sur tous les fronts, mais surtout d’un chef.  
C’était un de ces hommes nés pour entraîner derrière eux, vers les actions héroïques, les âmes et les corps de leurs subordonnés, et pour tout obtenir d’eux, jusqu’au sacrifice total.  
La foi, la volonté tenace, l’autorité prestigieuse émanaient de la fierté de son attitude et de son regard clair et droit. Il était appelé à faire bien vite son chemin parmi nous, et ses épaules étaient faites pour porter allègrement les responsabilités des grands commandements d’aviation dans les prochaines guerres.  
Et moi, personnellement, je pleure en lui mon frère d’armes. Je l’ai vu arriver à 18 ans, en 1908, dans mon peloton de Dragons. J’ai vu sa personnalité se former bien vite à la rude école de notre régiment d’extrême frontière. Sa valeur de chef, son esprit de décision s’affirmaient déjà dans les exercices de nos patrouilles d’éclaireurs où nous préparions cette guerre que nous autres, nous savions si proche.  
Séparés à la mobilisation, nous nous sommes retrouvés à la dernière année de la guerre, tous deux devenus pilotes, aux jours sombres de Mai et juin 1918. Bien des fois ses ailes ont protégés les miennes, pendant que je cherchais les traces des fantassins ennemis, dans les champs envahis du Soissonnais ; - Et deux mois après, alors que j’étais à l’hôpital, il m’apportait un soir les croix noires d’un avion ennemi qui avait survolé l’hôpital, et qu’il avait voulu empêcher de troubler mon sommeil de blessé.  
Enfin, en 1920, lorsqu’il mit fin à sa vie errante qui, depuis 1914, le menait sur tous les fronts français, roumains, russes et polonais, il redemande à servir sous mes ordres, au 1er Régiment. Depuis c’était la collaboration confiante de tous les jours, la communauté absolue d’idées et de sentiments, et les liens d’amitié qui se resserraient de plus en plus, à mesure que les heures passaient pour nous sous ce même harnais.  
Il remplaçait pour moi mes amis d’autrefois, que j’ai vus tomber les uns après les autres au long des années de guerre, et comme eux, le voilà aujourd’hui disparu. Avant de me séparer de ce qui nous reste de lui, ce corps que son âme ardente animait avec tant de vie, je voudrais dire à nos amis belges, ce qu’a fait pendant la guerre ce modèle d’officier français.  
Douze citations, 5 blessures, 9 appareils ennemis abattus, jalonnent sa carrière de cavalier, de fantassin, d’aviateur.  
Il a commencé la guerre comme sous-officier au 12ème Dragons. Il a été de ceux qui ont su trouver l’occasion de se battre à l’arme blanche, d’homme à homme, et ses Premiers mois de guerre en 1914 lui valent :  
Une blessure par éclat d’obus le 29 Août, une blessure par coup de lance le 6 Octobre, une citation le 8 Octobre, dont voici le texte :  
Chef de reconnaissance à longue portée, malgré une blessure reçue dans un engagement avec une patrouille ennemie qu’il a culbutée, a continué sa mission et rapporté les renseignements demandés. "  
Une citation à l’ordre du 12ème régiment de dragons, le 4 Novembre :  
" Est resté dans une marche en retraite à l’endroit où venaient de tomber les blessés, pour les soigner ; n’a rejoint l’escadron que sur ordre formel de l’officier ; est retourné avec des volontaires de l’escadron relever les blessés et leur a prodigué les soins les plus intelligents et les plus dévoués "

Puis la Cavalerie s’éloigne du front hérissé de fil de fer. Bonneton demande à passer dans l’Infanterie ; Il y est nommé Sous-lieutenant le 22 mars 1915 au 82ème de ligne et pendant un an, il va faire la guerre de fantassin en forêt d’Argonne ; guerre de coups de main, guerre de mines, où son allant se déploie.  
Blessures le 20 mai au bois Bolante. Citation du 29 septembre :  
Vaillant officier, plein de bravoure et d’entrain. Lors de l a contre-attaque de nuit du 27 septembre, commandant un corps de grenadiers, a par son initiative et sa hardiesse, contribué à reprendre à l’ennemi trois lignes de tranchées".  
Blessures aux mains et aux jambes, le 15 mars 1916 au bois de la Fille-Morte. Citation du 4 avril :   
" Officier d’une bravoure éprouvée ; commandant les grenadiers du bataillon, s’est élancé crânement à la tête de ses hommes dans l’entonnoir d’une mine allemande, et a été blessé dans cette opération brusquée ".

La blessure du 15 mars l’a rendu momentanément boiteux et inapte à l’infanterie. Il demande à entrer dans l’aviation. En septembre 1916, il est breveté pilote, et aussitôt demande à aller tenter en Orient le raid Salonique-Bucarest. Trahi par le matériel, il rentre en France et repart aussitôt en mission diplomatique pour l’Angleterre, la Norvège, la Suède et la Russie et il reparaît en Roumanie pour la campagne de 1917. Il y instruit l’infanterie et les grenadiers, commande deux escadrilles, mérite deux citations et six décorations russes et roumaines.

Citation du 24 septembre 1917 :   
Officier d’une bravoure et d’un courage remarquables, déjà quatre fois lessé et quatre fois cité. Excellent pilote, toujours volontaires pour les missions dangereuses a eu déjà plusieurs combats très durs surle front de Roumanie. Le 8 août, a abattu dans nos lignes un avion de chasse ennemi, de beaucoup supérieur à son appareil, sauvant ainsi un ballon allié. "

Citation du 31 décembre 1917 :

Excellent pilote de reconnaissance, qui a accompli de nombreuses missions éloignées. Continue à montrer comme pilote de chasse la même audace et le même courage. Le 3à octobre 1917, a dégagé un avion de reconnaissance, en abattant un appareil qui l’attaquait. "

En 1918, il entreprend de rentrer en France à travers la Russie bolchevisée, tantôt prisonnier des bolcheviks, tantôt les forçant à réatteler la locomotive de son train. Il arrive en France en Avril et je reçois une lettre pressante de lui, m’adjurant de l’aider à sortir des écoles qui ne veulent plus le lâcher. Huit jours après, il arrive à l’escadrille 69, mon escadrille de chasse d’armée, à la 10éme armée.  
C’était le moment où cette 10ème armée, sous l’impulsion du général Mangin, livrait une bataille tous les trois jours. Laissant le travail du haut du ciel aux avions de la division aérienne, l’escadrille 69 se bat sur les pointes des baïonnettes de ses fantassins. A chaque attaque, ses avions accompagnent l’infanterie, défendent les observateurs, attaquent ceux de l’ennemi, mitraillent les fantassins boches, parfois descendus eux-mêmes par leur tir.

Bonneton est de toutes ces fêtes, dans le rang d’abord, bientôt en tête des patrouilles, le sourire sur les lèvres, l’œil clair dardé sur l’adversaire. Il jouit de réaliser si pleinement cette nouvelle forme de son idéal de guerrier. Au retour de ces vols, il est le plus précieux animateur de cet esprit de joie et d’allégresse dans le sacrifice journalier, de camaraderie profonde, qu’en dehors de la 69, je n’ai jamais retrouvé si intense.

Voici ses citations dans cette période:  
 3 août, Chevalier de la légion d’honneur :  
" Officier d’élite. Blessé deux fois dans la cavalerie et passé, sur sa demande dans l’infanterie. Blessé de nouveau, à deux reprises, et, inapte, a demandé à entrer dans l’aviation. S’y est signalé de suite comme pilote de chasse de 1er ordre, admirable d’entrain et d’énergie. A abattu récemment son 3ème avion ennemi ; 6 citations. "

14 septembre :  
" Pilote de chasse remarquable, modèle de courage et de sang froid. Le 22 août 1918, parti sel à l’attaque d’un Drachen, l’a abordé à faible distance et l’a incendié. Emporté par son élan, a traversé le ballon en feu, et bien que brûlé à la face, a réussi à revenir à son terrain avec un appareil désemparé et plusieurs mètres de l’enveloppe du Drachen accrochés à son avion ".  

12 Novembre :  
" Pilote de Chasse d’un courage et d’une ardeur rares. Le 15 Août 1918, a abattu un Drachen en flammes et, au retour, mitraille au ras du sol des détachements et incendie une voiture d’un convoi. Le 2 septembre a encore abattu un ballon d’observation ennemi. 5ème et 6ème victoires. 295 heures de vol sur l’ennemi. "

10 décembre :  
" Pilote de chasse remarquable, modèle de modestie, de bravoure et de sang froid, vivant exemple des plus belles qualités militaires. Le 22 octobre 1918 a incendié un Drachen. Neuf appareils ennemis abattus. 380 heurs de vol. "

Enfin Ordre Du 12 Avril 1919, rappels d’appareils abattus, que seule l’occupation de leur point de chute et les rapports des habitants ont permis d’homologuer, tant les combats s’étaient passées loin chez l’ennemi.  
" Pilote de chasse d’une valeur remarquable et d’un courage rare. Le 7 août 1918 attaque ç=à faible attitude un Drachen et l’abat en flammes. Le 2 septembre, parti à l’attaque d’un Drachen, est attaqué seul par quatre avions ennemis et bien qu’ayant son avion gravement atteint, abat l’un d’eux. 7ème et 8ème appareils. "

A la fin de la campagne, il a la joie de conduire la 69 en occupation sur le Rhin. Il est nommé capitaine le 25 mars 1919, et, la guerre finie en France, se rallumant en Pologne, il y vole. Il reçoit là , sa cinquième blessure et la croix des Vaillants du gouvernement polonais, au cours des opérations devant Varsovie, et rentre enfin en France au milieu de 1920, au 1er régiment d’aviation.  
Il reçoit, après son retour, la croix d’officier de la Légion d’Honneur, avec cette Douzième citation, résumé de ses gloires  
 " Magnifique soldat, deux fois blessé, deux fois cité dans la Cavalerie. Deux fois blessé, deux fois cité dans l’infanterie. Inapte à cette arme et passé dans l’Aviation, y a reçu une nouvelle blessure, 7 citations et abattu 9 appareils ennemis ".

Fixé enfin sur le sol français, il réalise le rêve qu’il avait formé pendant ses combats en Argonne, où, dans l’intervalle de ses coups de main, il avait rencontré une jeune fille.  
Il ramène au 1er régiment cette jeune femme digne de servir d’exemple à toutes les femmes d’officiers. Elle a su dominer ses angoisses et laisser toute sa sérénité à son mari, dans ce rôle d’entraîneur d’hommes, qu’il devait à la patrie et qu’il remplissait si magnifiquement ;  
Je le regardais vivre dans la joie : bonheur à son foyer, bientôt complété par la naissance d’une petite fille qu’il adorait. 
Sympathie dont ses camarades l’entouraient dans le rayonnement qui émanait de son ascendant.
 

Satisfaction dans la commandement de son groupe de 4 belles escadrilles ; il avait su faire passer en elles sa flamme et tout son personnel brûlait de la même ardeur au service et en vol.
 
On lui donne à essayer les nouveaux appareils Nieuport 29, et c’est à ses essais que l’on doit les perfectionnements qui ont fait de l’appareil fragile, mal armé et risquant l’incendie au début, le bel appareil de guerre qui va armer les aviations de chasse belges et françaises.  
Enfin, il met au point l’équipe de 6 pilotes qu’une de ses escadrilles fournissait pour venir à Bruxelles. Il l’amène plein de confiance se présenter devant vous, et vous savez le reste, cet accident affreux, où menée par lui comme ses combats de la guerre, la chasse aux ballonnets qui ne pouvaient monter assez haut, s’est terminée par sa chute.

Dieu l’a rappelé auprès des camarades de ses brillants combats de 1918 : Malaviolle, Lomasse, Fageol, qui l’ont précédé au séjour des élus ; Il nous a laissé l’exemple de toute sa vie pour guider les générations futures du 1er régiment et la douleur de le pleurer.  
Si quelque chose pouvait adoucir cette douleur, c’est l’universel concours de sympathies et ‘amitriés dont toute la Belgique nous a entourés, la bonté avec laquelle Sa Majesté s’est penchée sur notre souffrance pour y mettre un rayon de gloire, l’empressement de tous nos camarades de l’armée, de l’aviation, des armées alliées et de toute la population pour nous aider à porter notre croix et reconduire le corps de notre ami.

Au nom du 1er régiment de chasse et de toute l’aviation Française, je salue le capitaine Bonneton, officier de la légion d’honneur et de l’ordre de Léopold, mort pour la France, en service aérien commandé.Bonneton F 1.JPG (52304 octets)

 

 

Bonneton F 2.JPG (75994 octets)

Bonneton F Evere.JPG (68893 octets) 

 

La conquête de l’air

(journal belge)

1er Juillet 1922

9

 

Country: France
Rank: Capitaine
Service: French Air Service
Units: Spa69
Victories: 9
Born: 10 May 1890
Place of Birth: La Coucourde-Montelimar
Died: 24 June 1922 Killed In Flying Accident

 

 

Fernand Bonneton

Fernand Bonneton est né le 10 mai 1890 à la Coucourde (Montélimar), Drôme.

Il est mort le 24 Juin 1922 à Bruxelles.

 

« Dans le courant de l’après midi du samedi, commença un concours de ballonnets. « D’un point du champ d’aviation, on lâche deux ballonnets tandis que d’un point opposé « s’élève aussitôt un avion que le pilote dirige vers les ballonnets dans l’intention de les « détruire.

« C’est au cours d’un exercice de ce genre que le regretté Capitaine Bonneton s’est « tué.

« Le brillant officier, pilotant l’appareil 43, venait de détruire un ballonnet et s’élançait « à la poursuite du second quand l’accident se produisit.

« On se porta immédiatement au secours de l’infortuné Capitaine qui gisait inanimé « au milieu des débris de l’appareil. Transporté à l’infirmerie de l’aviation civile, l’aviateur reçut « les soins les plus empressés du docteur Brabant qui constata que le blessé avait une « fracture « à la base du crâne et les deux jambes brisées .Il fut transporté à l’hôpital militaire « et mourut dans la soirée, malgré tous les soins qui lui furent prodigués.

« Le capitaine Bonneton était un héros de la guerre, officier de la Légion d’Honneur et « titulaire de douze citations à l’ordre du jour de l’armée française. Il commandait « actuellement l’escadrille de Thionville. Madame Bonneton se trouvait sur le champ d’aviation « au moment de l’accident ; elle accourut immédiatement au chevet de son mari. Ancienne « infirmière au front pendant la guerre, elle ne voulut pas quitter le blessé malgré les prières « des assistants. Elle ne se sépara de lui qu’au moment du transfert à l’hôpital »

 

La conquête de l’air (journal belge) - 1er Juillet 1922

 

Le commandant Houdemon, commandant le 1er Régiment de Chasse de Thionville – régiment auquel appartenait le capitaine Bonneton – lui a rendu le pus bel hommage qui soit, parce que c’était un hommage venant du plus profond de son cœur :

 

« L’Aviation Française, le 24 Juin 1922, a fait une perte irréparable. La mort du « Capitaine Bonneton la prive non seulement d’un pilote de guerre, dont la valeur s’était « affirmée dans tous les combats et sur tous les fronts, mais surtout d’un chef.

« C’était un de ces hommes nés pour entraîner derrière eux, vers les actions « héroïques, les âmes et les corps de leurs subordonnés, et pour tout obtenir d’eux, jusqu’au « sacrifice total.

« La foi, la volonté tenace, l’autorité prestigieuse émanaient de la fierté de son « attitude et de son regard clair et droit. Il était appelé à faire bien vite son chemin parmi « nous, et ses épaules étaient faites pour porter allègrement les responsabilités des grands « commandements d’aviation dans les prochaines guerres.

Et moi, personnellement, je pleure en lui mon frère d’armes. Je l’ai vu arriver à 18 « ans, en 1908, dans mon peloton de Dragons. J’ai vu sa personnalité se former bien vite à la « rude école de notre régiment d’extrême frontière. Sa valeur de chef, son esprit de décision « s’affirmaient déjà dans les exercices de nos patrouilles d’éclaireurs où nous préparions cette « guerre que nous autres, nous savions si proche.

« Séparés à la mobilisation, nous nous sommes retrouvés à la dernière année de la « guerre, tous deux devenus pilotes, aux jours sombres de Mai et juin 1918. Bien des fois ses « ailes ont protégés les miennes, pendant que je cherchais les traces des fantassins ennemis, « dans les champs envahis du Soissonnais ; - Et deux mois après, alors que j’étais à l’hôpital, « il m’apportait un soir les croix boires d’un avion ennemi qui avait survolé l’hôpital, et qu’il « avait voulu empêcher de troubler mon sommeil de blessé.

« Enfin, en 1920, lorsqu’il mit fin à sa vie errante qui, depuis 1914, le menait sur tous « les fronts français, roumains, russes et polonais, il redemande à servir sous mes ordres, au « 1er Régiment. Depuis c’était la collaboration confiante de tous les jours, la communauté « absolue d’idées et de sentiments, et les liens d’amitié qui se resserraient de plus en plus, à « mesure que les heures passaient pour nous sous ce même harnais.

« …. Il a commencé la guerre comme sous-officier au 12ème Dragons. Il a été de ceux « qui ont su trouver l’occasion de se battre à l’arme blanche, d’homme à homme, et ses « Premiers mois de guerre en 1914 lui valent une blessure par éclat d’obus le 29 Août, une « blessure par coup de lance le 6 Octobre.

« … Puis la Cavalerie s’éloigne du front hérissé de fil de fer. Bonneton demande à « passer dans l’Infanterie ; Il y est nommé Sous-lieutenant le 22 mars 1915 au 82ème de ligne « et pendant un an, il va faire la guerre de fantassin en forêt d’Argonne ; guerre de coups de « main, guerre de mines, où son allant se déploie….

« Blessures le 20 mai au bois Bolante.  Blessures aux mains et aux jambes, le 15 mars « 1916 au bois de la Fille-Morte…. 

« La blessure du 15 mars l’a rendu momentanément boiteux et inapte à l’infanterie. Il « demande à entrer dans l’aviation. En septembre 1916, il est breveté pilote, et aussitôt « demande à aller tenter en Orient le raid Salonique-Bucarest. Trahi par le matériel, il rentre « en France et repart aussitôt en mission diplomatique pour l’Angleterre, la Norvège, la Suède « et la Russie et il reparaît en Roumanie pour la campagne de 1917. Il y instruit l’infanterie et « les grenadiers, commande deux escadrilles, mérite deux citations et six décorations russes « et roumaines.

« En 1918, il entreprend de rentrer en France à travers la Russie bolchevisée, tantôt « prisonnier des bolcheviks, tantôt les forçant à réatteler la locomotive de son train. Il arrive « en France en Avril et je reçois une lettre pressante de lui, m’adjurant de l’aider à sortir des « écoles qui ne veulent plus le lâcher. Huit jours après, il arrive à l’escadrille 69, mon « escadrille de chasse d’armée, à la 10éme armée.

 « C’était le moment où cette 10ème armée, sous l’impulsion du général Mangin, livrait « une bataille tous les trois jours. Laissant le travail du haut du ciel aux avions de la division « aérienne, l’escadrille 69 se bat sur les pointes des baïonnettes de ses fantassins. A chaque « attaque, ses avions accompagnent l’infanterie, défendent les observateurs, attaquent ceux « de l’ennemi, mitraillent les fantassins boches, parfois descendus eux-mêmes par leur tir.

« Bonneton est de toutes ces fêtes, dans le rang d’abord, bientôt en tête des « patrouilles, le sourire sur les lèvres, l’œil clair dardé sur l’adversaire. Il jouit de réaliser si « pleinement cette nouvelle forme de son idéal de guerrier. Au retour de ces vols, il est le plus « précieux animateur de cet esprit de joie et d’allégresse dans le sacrifice journalier, de « camaraderie profonde, qu’en dehors de la 69, je n’ai jamais retrouvé si intense.

« A la fin de la campagne, il a la joie de conduire la 69 en occupation sur le Rhin. Il « est nommé capitaine le 25 mars 1919, et, la guerre finie en France, se rallumant en « Pologne, il y vole. Il reçoit là, sa cinquième blessure et la croix des Vaillants du « gouvernement polonais, au cours des opérations devant Varsovie, et rentre enfin en France « au milieu de 1920, au 1er régiment d’aviation.

« Il reçoit, après son retour, la croix d’officier de la légion d’Honneur, avec cette « douzième citation, résumé de ses gloires

 « Magnifique soldat, deux fois blessé, deux fois cité dans la Cavalerie. Deux fois blessé, deux fois cité dans l’infanterie. Inapte à cette arme et passé dans l’Aviation, y a reçu une nouvelle blessure, 7 citations et abattu 9 appareils ennemis ».

« Fixé enfin sur le sol français, il réalise le rêve qu’il avait formé pendant ses combats « en Argonne, où, dans l’intervalle de ses coups de main, il avait rencontré une jeune fille.

« Il ramène au 1er régiment cette jeune femme digne de servir d’exemple à toutes les « femmes d’officiers. Elle a su dominer ses angoisses et laisser toute sa sérénité à son mari, « dans ce rôle d’entraîneur d’hommes, qu’il devait à la patrie et qu’il remplissait si « magnifiquement ;

« Je le regardais vivre dans la joie : bonheur à son foyer, bientôt complété par la « naissance d’une petite fille qu’il adorait.

« Sympathie dont ses camarades l’entouraient dans le rayonnement qui émanait de « son ascendant.

« Satisfaction dans la commandement de son groupe de 4 belles escadrilles ; il avait « su faire passer en elles sa flamme et tout son personnel brûlait de la même ardeur au « service et en vol.

«  On lui donne à essayer les nouveaux appareils Nieuport 29, et c’est à ses essais « que l’on doit les perfectionnements qui ont fait de l’appareil fragile, mal armé et risquant « l’incendie au début, le bel appareil de guerre qui va armer les aviations de chasse belges et « françaises.

« Enfin, il met au point l’équipe de 6 pilotes qu’une de ses escadrilles fournissait pour « venir à Bruxelles. Il l’amène plein de confiance se présenter devant vous, et vous savez le « reste, cet accident affreux, où menée par lui comme ses combats de la guerre, la chasse « aux ballonnets qui ne pouvaient monter assez haut, s’est terminée par sa chute….

 

 

 

 

La conquête de l’air (journal belge) - 1er Juillet 1922