L'APPROCHE POSTALE" - DU DC 3 au F 27 -

Dans l'histoire du matériel volant au CEP, le DC 3 a été l'instrument de l'enracinement et du développement du transport du courrier métropolitain par avion. La Poste, pour maintenir sa confiance et sa clientèle, avait besoin d'une ponctualité et d'une régularité exemplaires. A l'époque les sceptiques étaient nombreux.

Le DC 3 l'a fait

Le DC 3 a été longuement décrit dans notre bulletin. Chez nous sa carrière s'est étalée grosso modo sur 20 ans (1948-1968). Lorsqu'on a parlé de son remplacement, en 1964, personne alors ne se serait aventuré à penser que son remplaçant ferait beaucoup mieux. Le F 27 a commencé officiellement à succéder au DC 3 dans la nuit du 21 au 22 octobre 1968 sur Paris-Perpignan et Strasbourg-Bordeaux. On peut d'ailleurs poser une question à tous nos lecteurs amateurs d'histoire de l'aviation : qui pourra nous dire si un avion de ligne dépasse le F 27 en durée d'utilisation, avec la même régularité ? Il y a peut-être là matière à homologation d'un record.

Mais il est difficile, après coup, d'écrire l'histoire d'un avion sans histoire.

Pour assurer cette ponctualité et cette régularité, il a fallu les prouesses des services d'entretien pour que les avions partent à l'heure, en parfait état, quelles que soient les conditions météorologiques et les différents types d'appareils. En effet, de 1967 à 1974, le Centre exploita 3 types d'avions différents : le DC 3, le DC 4 et le F 27. Dès 1945 dans les cockpits, il avait été nécessaire de mettre au point une méthode de travail particulière, avec une répartition rigoureuse des tâches en équipage pour maintenir la régularité par très mauvaises conditions météorologiques

Pour se poser par mauvaises conditions et de nuit - comme c'est exclusivement le cas au CEP un avion a besoin au sol - d'aides radioélectriques sur l'aérodrome qui vont permettre une trajectoire d'approche aussi précise que possible. Dans l'espace, cette trajectoire sera définie par l'intersection d'un plan vertical émis par un faisceau radioélectrique débutant quelques kilomètres avant l'entrée de la piste et se terminant sur l'axe central (on l'appellera le Locator) et d'un plan incliné à 3 0, matérialisé par un faisceau radioélectrique, se terminant au point d'impact idéal sur la piste (on l'appellera le glide).

Le LOC plus le glide constitueront l'ILS (Instrument Landing System)

- de petites balises émettant un très fin signal radioélectrique vertical permettant de se situer en distance par rapport à l'entrée de la piste (on les appellera les Markers).

- d'un balisage lumineux approprié dont l'objectif sera d'accroître le "segment visuel" du pilote pour qu'il puisse poser l'appareil manuellement en toute sécurité. Sur les terrains modernes on trouvera dans l'ordre : la rampe d'approche qui permettra au pilote de se situer VISUELLEMENT en courte finale avant l'entrée de la piste les balises vertes qui matérialisent le début du béton les balises blanches (en général) qui délimitent le rectangle de la bande enfin, une succession de feux encastrés, très rapprochés, qui matérialisent avec une très grande précision l'axe central de la piste.

- et enfin, des observations météorologiques fiables qui mesureront - si c'est possible - les visibilités verticale et horizontale. Ces mesures seront d'une grande aide au pilote qui va savoir "à quoi s'attendre". Il convient ici de remarquer que la visibilité transmise par radio au pilote sera forcément horizontale, alors qu'il en aura une perception oblique lorsque l'avion débouchera de la brume.

à bord

- des instruments de pilotage et de navigation permettant de voler par tous les temps de nuit et de suivre les indications des aides au sol

- des liaisons radiotéléphoniques permettant de recevoir les informations du contrôle et de la météo.

Cette longue énumération des moyens nécessaires à une exploitation sûre et régulière, on ne la trouvait complète - ou à peu près complète - en 1968, que sur quelques grandes plates-formes comme Orly, Toulouse, Bordeaux, Lyon, Marseille. Sur les autres terrains, il fallait faire avec les moyens du bord. La Postale ne transportant pas de passagers, Didier Daurat et Raymond Vanier, dans les années 50, réussirent à convaincre la DGAC de nous accorder un statut spécial le droit "d'aller voir". Ainsi le pilote a le droit de faire une approche, quelles que soient les valeurs de visibilité et de plafond qui lui sont communiquées par la tour de contrôle. L'atterrissage proprement dit se fait toujours "à vue" après que le Commandant l'ai jugé possible en fonction des conditions rencontrées en très courte finale.

Aujourd'hui, lorsqu'on parle des approches automatiques sur les machines très modernes, on a tendance à oublier qu'en 1945, le Commandant d'un JU 52 recevait des caps vers la station en morse. Le radio lui transmettait la valeur du cap sur un papier car il y avait trop de bruit pour s'entendre ! En 1959, les communications air/sol passent progressivement de la télégraphie (morse) à la téléphonie (VHF). L'équipage de base qui était : un commandant - un mécanicien navigant - un radio navigant devient progressivement : un commandant - un pilote - un mécanicien navigant.

C'est ainsi que les planches de bord des DC 3 seront peu à peu modifiées, suivant un schéma qui est standardisé sur tous les avions d'Air France encore aujourd'hui. Les planches de bord des 2 pilotes seront identiques :

anémomètre horizon altimètre

ID 48 caps sonde

variomètre

Peu à peu la méthode de l'approche postale va se figer. Le Commandant qui assure l'organisation et la coordination du travail à bord est le seul à regarder à l'extérieur et annonce ce qu'il voit. C'est lui qui, lorsqu'il jugera les références visuelles suffisantes annoncera " A moi les commandes  "

Il assure alors l'atterrissage ou la remise de gaz si les conditions se dégradent. L'Officier pilote se consacre exclusivement au pilotage aux instruments pour maintenir l'avion sur les axes ILS. On dira qu'il a "le nez dedans". L'Officier mécanicien, quant à lui, s'occupe de la conduite des moteurs, des particularités techniques et lit la radiosonde, fournissant aux pilotes une information auditive précieuse sur la proximité du sol.

Sur DC 3 le pilote, ayant réglé son récepteur sur la fréquence ILS appropriée, recevra 2 indications qui le situeront par rapport à l'axe de la piste et du plan idéal de descente sur un instrument unique l'ID 48.

- une aiguille verticale mobile lui indiquera s'il est à gauche de l'axe sur l'axe à droite de l'axe.

- une aiguille horizontale mobile lui indiquera s'il est :

- au-dessus du plan

- sur le plan

- en dessous du plan

L'approche idéale, en dépit des conditions extérieures défavorables (turbulences, variations de vent, etc... ) se fera en maintenant les 2 aiguilles centrées. Le pilote exploite simplement et directement les informations primaires venant des aides au sol.

En 1965, deux DC 4 vont recevoir à titre expérimental une "instrumentation intégrée". En plus des écarts primaires avec l'axe mentionné plus haut, le pilote recevra sur son horizon artificiel des indications pour revenir sur la trajectoire idéale. C'est l'apparition des "barres de tendances". Le système IIS SPERRY équipe déjà la Caravelle SE 210.

Le système donnant satisfaction, tous les DC 4 seront équipés au cours de l'hiver 1965/1966. Ils serviront même de plate-forme volante pour expérimenter un programme d'arrondi FLARESCAN, système donnant aussi la distance par rapport au point d'impact théorique idéal. Mais ceci est une autre histoire !

En novembre 1967, deux Fokker 27-400 sont mis en expérimentation sur la ligne Clermont-LyonMontpellier-Toulouse. Ils représentent, pour l'ensemble du personnel, une grande nouveauté. Ils sont équipés d'une instrumentation intégrée identique à celle des F 27-500 qui nous seront livrés l'année suivante. Pour l'époque, ces appareils sont très modernes. Faudra-t-il adapter les méthodes d'approche postale ? On va vite s'apercevoir qu'elles pourront être appliquées rapidement et sans difficultés particulières.

L'ID 48 est intégré au sein de l'A. D. I. (horizon artificiel perfectionné). En plus de sa fonction d'horizon artificiel traditionnel (tangage et roulis), on pourra lire sur l'instrument : un écart glide et la barre de tendance associée en tangage - un écart LOC et la barre de tendance associée en roulis - un indicateur de virage - la bille et une piste mobile (le NAJA). Le NAJA, à partir de 200 pieds d'altitude radiosonde, va sortir et représenter, par rapport à la maquette, la position de l'appareil en hauteur et en alignement relative à la piste. C'est un progrès très significatif.

Sur l'indicateur de situation horizontale (H.S.I.) le pilote retrouve une indication de cap, plus fiable que le conservateur de cap et que l'on ne recale jamais ! , l'indication de position par rapport à la route sélectée et les gisements des radiocompas 1 et 2. Un indicateur RMI donne les gisements des VOR 1 et 2 pour la navigation en route.

La cabine étant pressurisée, le confort de l'équipage est augmenté en réduisant les écarts d'altitude et en maîtrisant mieux les "varios". Quant à la climatisation : chauffage en hiver et réfrigération en été, c'est le luxe par rapport au "JANITROL" du DC 3

Si 30 ans après, vous demandez aux équipages qui ont démarré le F 27 au CEP ce qui les a le plus marqué, ils répondent unanimement : " C'est un bon avion ! permettant au CDB, par sa position, de mieux voir les rampes et les feux de piste, plus précis à piloter, tellement plus silencieux, avec moins de vibrations... de plus, c'est un avion neuf ! "

Grâce à la bonne maîtrise des stages de qualification équipage et à l'entraînement aux instruments intégrés sur les DC4 IIS, la transition DC 3, F 27 en 1968/1969 s'est faite sans fracture.

C'EST DEJA DE L'HISTOIRE !

***La phase 3 B est pratiquement atteinte en opérations régulières par notre " Postale de Nuit " qui utilise des moyens tout à fait rudimentaires... dans L'ATTERRISSAGE TOUS TEMPS par R. LAMI 
***Enfin l'expérience française de la Postale de nuit est là avec le fait brutal et permanent de sa régularité à plus de 99 %.
.. dans AMELIORATION DES INSTRUMENTS DE BORD PERMETTANT LE CONTROLE DE L'AVION JUSQU'AU SOL par R. Lamy 

  revue No 47

             

Dernière mise à jour/ latest updating  28 janv. 2009