Jean Belotti mai 2002
MESURES DE SÛRETÉ SUR LES AÉROPORTS

De nombreux lecteurs m’ont fait part de leurs questions quant à la nature des vérifications qui sont appliquées sur les aéroports. En résumé: Qui fait Quoi et Comment? Plusieurs d’entre eux sont surpris du nombre de vérifications qu’ils doivent subir, de la longueur des formalités. La raison essentielle semble provenir du fait qu’ils ignorent dans quel plan s’inscrit l’ensemble de ces contrôles. 
C’est la raison pour laquelle il paraît utile de connaître quelles sont les mesures qui sont appliquées à tous les vols commerciaux au départ des aérodromes du territoire français, effectués par des avions - quelle que soit leur taille - y compris les vols de l’aviation d’affaires. Cela permet, au moins, d’éviter aux nouveaux passagers, la désagréable surprise de subir des vérifications tatillonnes. Une passagère s’insurge d’être palpée " comme si, avec mes deux enfants en bas âge et une pince à ongles, j’étais une pirate potentielle". 
Ces mesures figurent dans le "Plan Vigipirate" renforcé (a). Il apporte la réponse à presque toutes les questions posées, à tout le moins, pour ce qui concerne notre pays. Il fait l’objet de la présente chronique. 
D’une façon générale, retenons que les tâches à accomplir sont réparties entre les compagnies aériennes (donneurs d’ordres) et les assistants en escale (sous-traitants) (b). C’est donc au donneur d’ordre de s’assurer que les mesures de sûreté sont correctement mises en oeuvre. Mais les sous-traitants sont également tenus à signaler au donneur d’ordre toute lacune ou dysfonctionnement, en particulier lorsque ce dernier n’est pas présent sur la plate-forme. 
Les gestionnaires d’aérodromes sont chargés de tout ce qui concerne l’adaptation des infrastructures et équipements divers composant les installations de contrôles et du fonctionnement de celles-ci. 
Quant aux services de l’Etat (Gendarmerie, Police, Douane), ils interviennent chaque fois qu’ils sont sollicités et selon leurs propres plans d’intervention programmés (ou vérifications, inspections et contrôles aléatoires).

* Débutons par les mesures de sûreté vous concernant, ainsi que vos bagages à main.

Tout d’abord, soyez à l’écoute des annonces sonores diffusées par le gestionnaire d’aérodrome - au moins toutes les 15 minutes - dans les plages horaires de la fréquentation de l’aérogare. Elles traitent des bagages abandonnés; de la limitation du nombre de bagages en cabine; des précautions relatives à la confection et à la surveillance des bagages; de l’interdiction d’emport en cabine des couteaux et objets contondants. Lisez également les consignes, aisément visibles, affichées dans la zone publique de l’aérogare. 
La première mesure prise par les compagnies aériennes ou leurs assistants est de vérifier la concordance entre votre nom figurant sur votre titre de transport et celui figurant sur un document attestant votre identité et comportant une photographie, qui, en général, est un passeport (ou la carte d’identité nationale pour les vols intérieurs). 
Pour certaines destinations effectuées par un aéronef de plus de 100 places, les passagers, d’un vol sur deux, font l’objet d’un "questionnement actif", après avoir été sélectionnés aléatoirement.

L’objectif est de s’assurer: 
- qu’ils ne transportent pas, à leur insu, des armes, des explosifs ou des engins dangereux; sur eux-mêmes, dans leurs bagages à main ou dans ceux de soute; 
- qu’ils n’ont accepté d’objets ou de bagages remis par un autre passager ou toute autre personne. 
Toute anomalie lors de ce questionnement conduit à une visite manuelle des bagages et ce, en leur présence.

Quant à vos bagages à main, vous serez invité à ne pas en emporter plus d’un, avec, cependant, une tolérance pour un ordinateur portable, ou l’attaché-case associé à un bagage au format cabine.

* Passons à l’inspection filtrage à laquelle vous serez soumis avec vos bagages à mains.

Tout d’abord, sachez que certains articles sont strictement interdits, aussi bien sur vous que dans vos bagages à main (c). Il s’agit de tous les objets contondants, ainsi que les couteaux et les cutters, quelle que soit la longueur ou la matière (métallique ou non) de leur lame. Retenez, cependant, que les objets tels que les limes à ongle, les coupes ongles et les rasoirs à main jetables avec des lames carénées non détachables, ne sont plus confisqués, comme cela l’était encore, il y a peu de temps. 
Pour effectuer ce contrôle, les agents de sûreté vous demanderont donc de vous délester de votre veste et manteau et de tous les objets (métalliques ou non, tranchants ou contondants) que vous portez sur vous. Tout cela est placé dans l’appareil de contrôle radioscopique. Puis, sous serez invité à passer au travers d’un portique (d) de détection des masses métalliques. Enfin, une palpation (e) sera effectuée: 
- si votre passage sous le portique a déclenché une alarme, 
- ou si vous avez été choisi, aléatoirement. 
Soumettez-vous de bon coeur à ces formalités car, en cas de refus de votre part, les personnels effectuant l’inspection filtrage doivent faire appel aux services de l’Etat qui vous obligeraient, alors, de vous y soumettre. 
Ne soyez également pas surpris de l’existence d’une inspection de filtrage supplémentaire qui peut être effectuée pour des vols vers certaines destinations.

Quant au filtrage de vos bagages à main, tous les objets qu’ils contiennent sont soumis au contrôle radioscopique. Certains de ces bagages peuvent aussi faire l’objet d’un examen visuel de leur contenu, avec votre consentement que vous avez intérêt à donner sinon, comme déjà dit, les personnels effectuant l’inspection filtrage font alors appel aux services de l’Etat.

* Indépendamment des vols sur des compagnies régulières ou charters, vous pouvez avoir prévu de voyager par une compagnie faisant partie de l’aviation d’affaire commerciale.

Dans ce cas, lorsque vous ne pourrez pas être contrôlé par le biais du service de sûreté du gestionnaire de l’aérodrome ou lorsque les compagnies aériennes ou leurs assistants en escale utilisent des installations privatives, ce sont les compagnies aériennes ou leurs assistants en escale qui feront effectuer l’inspection filtrage de vous-même et de vos bagages à main, préalablement à leur embarquement dans l’avion. Voilà comment l’opération doit se dérouler: 
Il vous sera demandé de vous délester de tous les objets que vous portez sur vous et un contrôle sera effectué au moyen d’un magnétomètre. Si vous avez été choisi aléatoirement, vous serez alors soumis à des palpations de sécurité.

* Passons aux vérifications avant l’embarquement.

La première vérification effectuée est celle de la validité de votre carte d’embarquement. Pour ce faire, les personnels des compagnies ou des assistants en escale s’assurent qu’au moment ou vous présentez à l’embarquement d’un vol, vous êtes bien titulaire d’une carte d’embarquement valable pour ce vol (numéro de vol et date). 
Puis, il sera vérifié que vous êtes bien un des passagers qui est enregistré sur ce vol, en effectuant un "rapprochement documentaire", à savoir, vérification de la concordance entre votre nom figurant sur votre carte d’embarquement et celui figurant sur un document attestant votre identité et comportant une photographie. 
À partir de ce stade, sachez que vous ne pouvez plus vous échapper. En effet, les personnels qualifiés s’assurent - en permanence - que chaque passager qui a été enregistré ne puisse se soustraire (entre la salle d’embarquement et l’aéronef) à l’embarquement, ce qui est réalisé: 
- soit par le contrôle des accès d’embarquement, lors de l’accès à l’aéronefs, associé au comptage des passagers à bord, 
- soit par une surveillance physique des circuits. 
Vous ne pourrez également pas changer de file de passagers. En effet, après l’inspection de filtrage, les personnels qualifiés s’assurent que les passagers ne puissent entrer en contact avec d’autres passagers n’ayant pas encore été soumis à une telle inspection. Cela implique une stricte séparation des flux de passagers dans des couloirs isolés les uns des autres. 
Si vous êtes en correspondance - c’est-à-dire ayant atterri sur un aéroport sur lequel vous êtes en attente de l’avion qui vous conduira à votre destination finale - ne soyez pas étonné d’être, une nouvelle fois, soumis à une inspection filtrage.

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Voilà les attentions qui sont portées à la sûreté et auxquelles vous vous êtes soumis avec patience. Mais il existe d’autres dispositions, invisibles pour vous, et qui concourent également à la sûreté des vols.

* Commençons par les mesures de sûreté concernant vos bagages de soute.

L’objectif du gouvernement, à la suite des attentats du 11 septembre 2001, est d’avancer la date à laquelle doit être réalisée l’inspection filtrage de 100% des bagages de soute, à l’aide d’équipements de détection qui devront être acquis avant le 30 juin 2002. 
Pour les vols de plus de 100 places, l’inspection filtrage de la totalité des bagages est réalisée grâce à d’importantes installations composées de tapis roulants, appareils de contrôle, systèmes d’étiquetage,.... 
Pour les autres vols, un agent - affecté exclusivement à cette tâche - effectue une visite manuelle de bagages présentés à l’embarquement et sélectionnés aléatoirement. 
Si vous embarquez dans un avion de l’aviation d’affaire commerciale, c’est la compagnie aérienne ou ses assistants en escale qui feront effectuer l’inspection filtrage de tous les bagages de soute au moyen d’une visite manuelle, et ce, en votre présence.

* La vérification de vous-même et celle de vos bagages ayant été effectuées séparément, il convient, maintenant, d’effectuer ce que l’on nomme le "rapprochement bagage-passager" qui permet de s’assurer: 
- que tous les bagages de soutes embarqués appartiennent à un passager figurant sur la liste des passagers du vol, et 
- que tous les bagages de soute des passagers figurant sur la liste des passagers du vol et qui ne se sont pas présentés à l’embarquement ont été retirés des soutes de l’aéronef. 
Ne soyez donc pas étonné si, quelques minutes avant l’embarquement, une annonce de retard, cause "recherche passager" vous est faite par le personnel de bord. En effet, l’avion ne pourra pas partir avec des bagages en soute, dont les propriétaires ne sont pas à bord de l’avion, ce qui est bien compréhensible. 
Sachez également que si le passager n’est pas retrouvé, il sera alors procédé à la recherche des bagages concernés qui seront alors débarqués. La localisation de ces bagages dans les soutes n’étant pas toujours rapide, il peut s’en suivre des retards importants. Dans certains cas et sur certains types d’avions, il peut être procédé à une reconnaissance des bagages. Tous les passagers sortent alors de l’avion et sont placés devant toutes les valises qui ont été débarquées des soutes. Chacun montre les siennes, ce qui est vérifié par les personnels qualifiés (concordance des numéros figurant sur le reçu en possession du passager et ceux figurant sur les étiquettes fixées sur les bagages). Les bagages n’appartenant à aucun des passagers sont alors pris en charge par les personnels qualifiés et, après rembarquement de tous les passagers, l’avion peut alors partir en toute tranquillité.

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Voilà l’essentiel des mesures de sûreté vous concernant directement. Mais, pour bien montrer l’ensemble du dispositif mis en place, d’autres mesures sont prises et il n’est pas non intéressant de les connaître.

* L’avion dans lequel vous avez pris place, peut transporter différentes marchandises dans ses soutes: fret, poste, colis postaux. Ces marchandises ont été sécurisées en ayant été soumises à des contrôles physiques, c’est-à-dire: 
- soit soumises à une vérification spéciale effectuée par un "expéditeur connu", 
- soit soumises à une visite de sûreté. 
Ces marchandises proviennent des zones de fret dont l’accès, depuis la zone publique des aérodromes, est limité aux seuls accès surveillés.

* Des mesures de sûreté concernent également les personnels et les véhicules. À la suite des attentats du 11 septembre 2001, l’objectif du gouvernement est d’arriver au plus vite et au plus tard dans le courant de l’année 2002, sur l’ensemble des aérodromes concernés, à une inspection des personnels et des véhicules pénétrant dans la zone réservée. Dans l’immédiat, il faut savoir qu’une priorité a été donnée aux aérogares. 
Pour le moment, il existe déjà des contrôles d’accès et des badges (f): 
- Pour les piétons, l’accès à la zone réservée est subordonné à la présentation du badge porté de façon apparente, valide pour le secteur et - à l’exception des personnels en uniforme de la police, de la gendarmerie et de la douane - d’un document comportant une photographie qui atteste de son identité. 
- Pour les véhicules, dans la mesure du possible, ceux utilisés pour l’exploitation à l’intérieur de la zone réservée ne doivent pas sortir de cette zone (véhicules captifs). (g).

* Il existe également des inspections filtrage des personnels et des véhicules dont les modalités dépendent de l’importance de l’aérodrome (moins de 200.000 passagers, plus de 200.000, plus de 3 millions).

* Il reste les équipages. Eux aussi, doivent montrer pattes blanches (carte professionnelle, badge), bien que revêtus de l’uniforme de leur compagnie.

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* Pour terminer, sachez que des mesures de sûreté concernent également les avions. 
En ce qui concerne l’avion proprement dit: 
- En exploitation, l’accès aux abords et à l’intérieur est surveillé par les compagnies aériennes ou les assistants en escale qui refuseront l’accès à toute personne non munie d’un titre d’accès valide et ne justifiant pas d’une activité. 
- Hors exploitation, les avions sont protégés au moyen d’un pastillage ou surveillés. 
En ce qui concerne l’intérieur de l’avion: 
- Chaque avion fait l’objet d’une vérification ou visite de sûreté de la cabine et de la soute, avant chaque embarquement de passagers et chargement de soute. 
- Les provisions de bord et les fournitures font également l’objet de mesures de sûreté, dont les modalités sont fonction du lieu de préparation. Il est veillé à ce qu’aucun article interdit ne soit placé dans les provisions de bord et les fournitures pendant leur acheminement. Les couteaux métalliques sont interdits pour le service à bord.

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Tous les personnels travaillant aussi bien dans les zones réservées que dans les zones publiques sont sensibilisés et restent très vigilants à ce qui les entourent. C’est ainsi qu’ils n’hésitent pas à signaler immédiatement à leur supérieur - ou au représentant du service de l’Etat le plus proche, toute anomalie qu’ils pourraient constater dans le comportement de certaines personnes ou dans le déroulement des contrôles de sûreté.

Dernier conseil, n’acceptez, sous aucun prétexte un sac, un paquet, une lettre, qui vous serait remise par un inconnu, avant votre embarquement, même si le motif est de nature à vous émouvoir (médicament pour sauver un enfant, ...).

La sûreté étant l‘affaire de tous, il convient que vous restiez également vigilant. Si quelque chose vous paraît anormale, n’hésitez pas à en faire part aux personnels vous entourant, munis de badges, ou aux policiers, gendarmes et douaniers. 
Il reste à espérer que les mesures qui s'imposent, sans distinction, à tous les aéroports, soient effectivement mises en oeuvre, car beaucoup d'entre eux ne disposent pas des moyens humains nécessaires (services publics ou sociétés de sécurité) ni des équipements obligatoires (Rayons X, magnétomètres,...). 
Bien sûr, ces mesures sont, sans cesse, évolutives en raison des objectifs définis par les institutions internationales et nationales qui tiennent compte des menaces et également des coûts réels imposés aux métiers du transport aérien. Ce sont ces coûts qui sont à l’origine des taxes de sûreté apparaissant sur vos billets d’avion. C’est donc vous qui assumez le financement de ces mesures sécuritaires et il est donc tout à fait légitime que vous en connaissiez la substance.

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(a) - Document n° 33, du 15 février 2002 - GIVS (Groupement Interministériel des Vols Sensibles). 
(b) - Ils doivent avoir reçu le double agrément: Préfet et Procureur de la République. 
(c) - Annexe de l’arrêté 10 octobre 2000. 
(d) - Les portiques sont réglés sur une sensibilité accrue selon les critères fixés par le Service Technique des Bases Aériennes (STBA) de la Direction Générale de l’Aviation Civile (DGAC). 
(e) - La palpation de sécurité est effectuée (dans les conditions fixées par la Loi 2001-1062 relative à la sécurité quotidienne, du 15 novembre 2001, à savoir, avec le consentement de la personne) par un agent de sûreté du même sexe que la personne qui en fait l’objet. 
(f) - La DGAC a demandé à ADP (Aéroports de Paris) de refaire tous les badges..C’est ainsi que 60.000 titres d'accès viennent d'être refaits par l’aéroport de Roissy - Charles de Gaulle, après une nouvelle enquête de police qui a permis de débouter quelques dizaines de demandes.
 (g) - Environ 3.500 véhicules sont actuellement autorisés à accéder en zone réservée, ce qui, de toute évidence, est difficilement contrôlable. De toute façon, il restera le problème du contrôle des véhicules des sociétés de "catering" implantées en zone publique et celui de l'avitaillement en carburant de ces véhicules, puisqu'il n'existe aucune station service (pour raison de sécurité) en zone réservée.      TOP

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Dernière mise à jour/ latest updating  28 janv. 2009