Le rêve brisé

Quatre éléments essentiels sont nécessaires pour assurer le succès d'une compagnie aérienne : des finances saines, un personnel efficace et loyal, des équipements de valeur et un réseau de lignes étendu et bien équilibré. En 1930, Marcel Bouilloux-Lafont les possédait tous les quatre !

1 - Une convention de longue durée incluant une subvention était promise Par Laurent Eynac. Ceci aurait garanti la stabilité financière.

2 - Mermoz et son équipe de bons pilotes étaient les étoiles des meilleurs équipages du monde.

3 - Le Laté 28, qui était en service, détenait plusieurs records aériens et des appareils encore plus performants étaient prévus.

4 - Le réseau de lignes était le plus long du monde, couvrant quatre continents et tout l'Océan Atlantique.

A ces quatre impératifs, pourrait être ajouté un autre moins pertinent aujourd'hui car presque chaque gouvernement le fournit maintenant :

5 - Une superbe infrastructure d'aéroports avec les aides à la radio et à la navigation.

Le 31 mars 1931, sur un simple coup de plume - ou pour être plus précis, par la défection du Gouvernement français de prendre la plume en main - le rêve fut brisé sans émotion.

La non ratification de la convention couvrant, la subvention à long terme ruina Bouilloux-Lafont. Par erreur, il avait admis la promesse de Laurent Eynac comme étant une promesse solennelle gouvernementale mais le contrat ne fut jamais ratifié par la Chambre des Députés. Bouilloux-Lafont n'avait pas attendu le mouvement des rouages bureaucratiques et avait concentré ses propres ressources, jointes aux emprunts publics, sur l'Aéropostale. Maintenant, il fut obligé d'investir tous ses biens. Les plans d'équipement furent abandonnés. Le réseau des routes aériennes fut réduit et les pillards arrivèrent. Son équipe resta loyale mais sans pouvoir l'aider. Une exception dans la loyauté fut Daurat, qui avait été la force conductrice persistante dépeinte dans les ouvrages de Saint-Exupéry et dont le rejet de valeurs humaines conduisit à la désaffection des pilotes qu'il commandait. Daurat fut obligé de quitter la Compagnie.

Des quatre éléments essentiels, il n'en restait qu'un à Bouilloux-Lafont, son personnel, mais celui-ci ne put rien faire pour lui, et, à la suite de l'examen de publications ultérieures, il apparaît que Daurat travailla à discréditer son ancien patron. Dans toute l'histoire des mésaventures des compagnies aériennes, seul le récent effondrement de la Braniff parait avoir atteint de telles dimensions ; mais il y a une différence fondamentale entre ces deux faillites. Avec insouciance, Harding Lawrence (de la Braniff), avait fait trop de dépenses, il avait trop étendu son réseau, il avait négligé de planifier sa flotte et il s'était aliéné la direction et tout le personnel. Marcel Bouilloux-Lafont n'avait commis aucune de ces erreurs ; il tomba victime de la jalousie de ses ennemis industriels et politiques.

Hélas, pour anéantir Bouilloux-Lafont, ces forces ont également saboté l'avenir des lignes aériennes françaises, et une partie de l'héritage et de l'avenir de la France a été déposée sur l'autel du sacrifice.

Ceux qui ont anéanti l'Aéropostale en portent la lourde responsabilité

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Bouilloux-Lafont

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