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votre Commandant.![]() Bienvenue à bord (a) |
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Les
phases principales du vol: * La préparation du vol * Le décollage * La croisière * La descente et l’atterrissage * L’analyse du vol |
Combien de fois n’avons nous pas entendu ce message, émanant de voix appartenant à des personnages de moins en moins visibles pour les passagers, sauf lorsqu’ils traversent les aérogares avec leur équipage. Certes, la plupart des passagers ne se posent pas de question à leur sujet et sont surtout occupés à trouver le numéro de leur siège et l’endroit où ils pourront caser leurs bagages de cabine. Ce sont pourtant ces pilotes qui ont pour mission de les amener à bon port, ce qui justifie donc l’intérêt qui leur est porté. Cependant - alors que les pilotes sont sur la sellette - il se trouve que plusieurs de mes lecteurs (tous types de voyageurs confondus : touristes ou professionnels), ont manifesté le souhait d’en savoir un peu plus sur eux. Échappant à l’actualité, c’est donc bien volontiers que j’aborderai le sujet. Certes, traiter en quelques pages du métier de pilote de ligne est une gageure, mais disons que cela peut être considéré comme une simple sensibilisation, avec plusieurs renvois en fin d’article à la disposition des curieux. C’est ainsi que, sans décrire les multiples facettes du travail du pilote, je commencerai, aujourd’hui, par présenter brièvement quelques caractéristiques attachées aux phases principales du vol. Tout débute par la préparation du vol. Deux heures avant le départ, l'équipage, avec la collaboration des "agents d'opérations" consulte tous les documents relatifs à la situation météorologique prévisible sur le parcours, sur le terrain de destination et sur celui de déroutement (b). Il prend également connaissance des renseignements portant sur le fonctionnement des infrastructures de navigation en route et à destination, de la charge marchande à transporter (passagers et fret), ainsi que de nombreuses autres informations concernant le vol. Tous ces éléments étudiés, le Commandant de bord prendra un certain nombre de décisions essentielles. Tout d’abord, il décide de la quantité de carburant à embarquer, ce qui me remet en mémoire cette anecdote : L'avion n'ayant pu attendre plus longtemps à la verticale d'un aéroport encombré, il s'était dirigé vers un aéroport voisin, ce qui avait conduit à la réflexion d'une passagère "Mais pourquoi le pilote n'a-t-il pas fait le plein avant de partir ?". La réponse est simple. Au décollage, un avion ne peut être plus lourd qu'une certaine masse maximum autorisée. Pour respecter cette limitation, embarquer le carburant nécessaire pour la réalisation du vol peut, dans certains cas, conduire à ne pas pouvoir embarquer tous les passagers. La solution passe alors par un emport moindre de carburant et un éventuel atterrissage, dans une escale intermédiaire, pour "refaire du carburant". Il est important de signaler que plus un avion est lourd, plus il consomme de carburant. Ainsi, le choix final de la quantité de carburant embarqué résulte toujours d'un compromis entre : - avoir une
quantité suffisante pour pallier toute difficulté
à l'arrivée (c) ; Puis, il décide également de la charge marchande pouvant être transportée, du choix de la route, de l'altitude, de la vitesse de croisière, etc... Toutes informations qui figureront dans un "plan de vol" signé par le Commandant de bord, confirmant, ainsi, son engagement à effectuer la mission, dans les conditions précisées par ses choix. Arrivé
à l'avion, l'équipage est occupé
simultanément par trois tâches : Puis, l’avion est autorisé à rouler pour se rendre à l’entrée de la piste en service, ce qui, sur la plupart des aéroports à grand trafic, prend une vingtaine de minutes, voire beaucoup plus pendant les heures de pointe ou par mauvaises conditions météorologiques. Toutes vérifications effectués, c’est alors que le pilote libère la poussée des réacteurs en "poussant les manettes des gaz". L'avion commence à prendre de la vitesse, sous le contrôle de l'équipage, totalement concentré et absorbé par cette phase essentielle. Le décollage est, en effet, une phase critique par le simple fait qu'il consiste, à partir d'une masse inerte de plusieurs dizaines, voire centaines de tonnes, de lui donner, en moins d'une minute, la vitesse nécessaire pour la décoller du sol et lui permettre de monter dans le ciel. Les
décisions prises par l'équipage pendant cette courte
période doivent être instantanées et les
conséquences en résultant, nécessitent toute son
habilité, son expérience et son sang-froid. En effet,
l'accélération sur la piste de décollage, avant
que l'avion ne prenne son envol, comporte deux phases, qu’il est bon de
connaître, pour bien comprendre leur déroulement: Rassurons-nous. De toute façon, les pistes des aéroports internationaux étant très longues, la vitesse V1 est souvent égale à la vitesse V2. Ainsi, en cas de panne avant la vitesse V1, l'avion dispose d'une bonne marge pour s'arrêter avant l'extrémité de piste. Le décollage se poursuit par la mise en montée. Il n'est pas nécessaire d'être spécialiste en aérodynamique pour comprendre et admettre que pour faire monter de telles masses dans le ciel, tout en augmentant la vitesse, il faut disposer de la poussée des réacteurs, calculée pour la masse du jour de l’avion. Or, sur presque tous les aéroports, existent ce que l'on nomme des "procédures anti-bruit" permettant de réduire la nuisance subie, parfois, par les riverains. Cette procédure consiste - dès qu'une certaine hauteur est atteinte, après la rentrée du train d'atterrissage - à réduire la poussée des réacteurs, ce qui peut être perçu par les passagers. Il en résulte donc l'impossibilité d'augmenter la vitesse de l'avion, une réduction du taux de montée (voire l'obligation de maintenir le vol en palier), et la nécessité d'un pilotage extrêmement "pointu", surtout en cas de turbulences. Si ladite procédure n'est pas correctement respectée, cela figurera sur les enregistreurs de bruits au sol, et l'équipage sera sanctionné (i) . La suite de la montée, jusqu'à l'altitude de croisière (on dit: "niveau de vol") peut se faire à différentes vitesses et différents taux de montée, en fonction des instructions du contrôle, des conditions météorologiques et des contraintes opérationnelles (consommation minimum de carburant, masse de l'avion). En croisière, la conduite du vol consiste à veiller au respect de la trajectoire de l'avion, ce qui nécessite une vigilance permanente de l'équipage, toute déviation de trajectoire non perçue pouvant rapidement être dangereuse. La vitesse des avions est telle que, deux minutes après un changement de cap de quelques degrés, l'avion peut se trouver sur une autre route aérienne, sur laquelle se trouvent d'autres avions, à la même altitude. La surveillance constante des paramètres de vol (fonctionnement des réacteurs, suivi de la consommation de carburant, vérifications de navigation,...), la prise en compte des différents imprévus et de l'évolution de la situation météorologique, une bonne perception de l'environnement, permettent, en temps utile, de prendre les décisions qui s'imposent. * La descente et l’atterrissage TOP En fin de vol, le début de la descente est, soit choisi par le Commandant de bord, soit imposé par le contrôle de la circulation aérienne. La procédure d'approche peut être précédée d'une attente qui s'effectue dans des espaces du ciel bien délimités, avant d'obtenir l'autorisation de débuter l'approche finale. En fonction de la situation météorologique, différents types d'approches peuvent être effectués: à vue ou aux instruments.(j) L'approche se poursuit jusqu'à ce que l'avion arrive à une hauteur caractéristique ("minima") à laquelle, si le pilote ne voit pas la piste (ou perd la vue de la piste, suite à une diminution de la visibilité), il doit, impérativement, remettre les gaz, pour reprendre de l'altitude. Il peut, alors, soit tenter une nouvelle approche sur la même piste, soit se diriger vers un autre aérodrome. Enfin, l’avion est prêt à atterrir. En vue de la piste, le pilote contrôle l'atterrissage qui peut être "manuel" ou - sous certaines conditions (k) - "automatique", avec différents degrés d'automatisation, selon le type d'avion. (l) Dès que la vitesse de l'avion a été suffisamment réduite, l'avion libère la piste d'atterrissage et utilise les voies de roulement pour se diriger vers son aire de stationnement. À très faible vitesse et avec grande précaution, le pilote guidera son avion pour passer dans des espaces bien délimités, jusqu'à atteindre le point exact et final d'immobilisation. C’est pendant cette phase qu’il vous est indiqué de ne pas détacher votre ceinture de sécurité avant l’arrêt complet de l’appareil. Contact est alors pris, par interphone, avec le préposé au sol qui confirme avoir placé les "cales" devant les roues (afin que l'avion reste immobile). Le pilote "coupe les moteurs", relâche les freins et l'équipage effectue, alors, la dernière check-list. Lorsque l'échelle, la rampe de débarquement ou la plate-forme du bus à élévation a été correctement placée, certaines portes peuvent être ouvertes sur la gauche de l'appareil. Le débarquement des passagers est alors possible. Une équipe procède, aussitôt, au déchargement des soutes à bagages. Puis, l'avion est assailli par plusieurs autres équipes chargées de la préparation de l'étape suivante. (m) À ce moment là, la mission étant accomplie, l’équipage procède au "debriefing" consistant à accomplir les différentes formalités et à rédiger divers compte-rendus, puis, prendra en compte des éléments du vol suivant. Se pose alors, a posteriori, la question de l'analyse du vol qui vient d'être réalisé. L'expérience montre que les prévisions, à partir desquelles les conditions du vol ont été déterminées, ne se réalisent pas systématiquement. Il en résulte que le Commandant de bord est fréquemment amené à prendre des initiatives, afin d'assurer un bon déroulement du vol jusqu'à la destination finale. Or, a posteriori, il sera toujours possible de considérer que le vol n'a pas été mené à bonne fin (n). Dans ce cas, le Commandant de bord devra "rendre compte", c'est-à-dire justifier ses décisions. Si la sécurité est effectivement le critère primordial qui le guide, il n'en reste pas moins vrai que, très souvent, il tient compte également d'autres critères: confort des passagers, ponctualité au départ et à l'arrivée, économie du vol, etc..., qui sont tous interdépendants. Il est vrai qu’il est plus facile, au sol - confortablement installé dans un bureau disposant de toute la volumineuse documentation aéronautique - de porter une appréciation sur une décision qui, elle, a été prise en vol et en temps réel, souvent en quelques secondes. Parmi les nombreux exemples pouvant être cités, en voici deux qui montrent la nature de la difficulté. - Changement de niveau de vol Si l'avion subit de fortes turbulences dues au vol dans un "jet stream" (o), le Commandant de bord peut: - soit privilégier le confort des passagers, c'est-à-dire demander l'autorisation au contrôle aérien de descendre à un niveau inférieur, sachant qu'il en résultera une augmentation de la consommation de carburant, - soit privilégier la sécurité à l'arrivée, c'est-à-dire rester dans le "jet-stream" pour conserver intacte sa réserve de carburant, au détriment du confort des passagers. Il est évident qu'a posteriori, si l'atterrissage s'est passé normalement, il est aisé de dire que la meilleure solution était celle du confort des passagers. - Dégradation de la situation météorologique Mais l'affaire est, en fait, plus compliquée. En effet, retenons l'hypothèse où le Commandant, pour améliorer le confort des passagers, a choisi de sortir du "jet stream", en acceptant donc une consommation supplémentaire de carburant. Quid du cas où une dégradation météorologique, un encombrement de piste par un avion en panne, etc... oblige soit à demander un atterrissage en urgence ("emergency"), soit à aller se poser sur un terrain de fortune, n'ayant plus suffisamment de carburant pour se diriger vers le terrain de déroutement initialement prévu ? Les textes précisent quelle doit être la quantité de carburant minimum à embarquer. En simplifiant, disons qu'elle comprend la quantité nécessaire pour aller du terrain de départ au terrain de destination et, en cas de nécessité, du terrain de destination au terrain de déroutement. Sont prévues également des réserves (de route, d'attente,...). Or, ce que ne prend pas en compte la réglementation, c'est le fait que lorsqu'il n'est plus possible d'atterrir sur un terrain de destination (piste inutilisable car verglacée, enneigée, occupée par un avion en panne,...) ou que les délais d'attente - avant d'avoir l'autorisation de se poser - sont anormalement allongés, presque tous les avions vont également se diriger vers le même aérodrome de déroutement, provoquant un nouvel encombrement des voies aériennes, si bien que les réserves initiales peuvent s'avérer nettement insuffisantes. C'est le cas de ce vol Paris/Boston où, après analyse de la situation météorologique, j'avais embarqué 10 tonnes de carburant de plus que la quantité précalculée par l'agent d'opération, au grand dam de l'économie de carburant. À Boston, les pistes étant verglacées, tous les avions se sont dirigés vers leur terrain de déroutement. Le nôtre était New York, qui n'a pas pu être retenu, car le temps d'attente annoncé était supérieur à une heure. Nous nous sommes donc dirigés vers Washington, terrain également très encombré, ce qui nous a obligé de prolonger jusqu'à Philadelphie, où, finalement, nous nous sommes posés, avec de très faibles réserves. --- *** --- Ces exemples montrent qu'avant de porter un jugement sur la validité des décisions du Commandant de bord, il convient de bien prendre en compte la spécificité des conditions dans lesquelles il a été amené à intervenir. En effet, toutes les décisions du vol doivent tenir compte de nombreuses variables. À un instant donné, plusieurs décisions logiques peuvent être prises. Elles varient, elles-mêmes, en fonction du pilote, de l'heure, de l'altitude, de la fatigue, de l'équipage, etc ... L’essentiel est de retenir que les équipages sont de mieux en mieux formés à la gestion des vols et que la sécurité reste leur préoccupation première. TOP --- *** --- (a).-
En complément, consulter l’ouvrage du Commandant Michel
Jouanneaux "Le pilote est toujours devant - Reconnaissance de
l’activité du pilote de ligne" - Octarès Edition Toulouse
- 1999 |
Bonjour, 1°.- Ma Chronique d’avril 3.- Les dernières
actus .... * L’intégrale de la série "Les Chevaliers
du Ciel", les célèbres aventures des lieutenants Michel
Tanguy et Ernest Laverdure, pilotes de l’Armée de l’Air à
bord de Mirage III, paraît en DVD. 4.- Situations imprévues — *** --- Bien cordialement. Jean Belotti PS-1 : Si vous connaissez des personnes intéressées par l'aérien, continuez à me communiquer leurs adresses E-mail, afin qu'elles soient automatiquement et gracieusement destinataires de mes "Lettres" et "Chroniques" . PS- 2: Pour être certain de ne pas vous importuner et surtout si vous ne lisez pas mes "Lettres" et "Chroniques", je vous remercie de bien vouloir cliquer sur en tapant "FIN" dans la case objet, pour que votre adresse E-mail soit automatiquement supprimée de ma Banque de Données. TOP |
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