Le départ de Marcel bouilloux-Lafont

Ayant cela en mémoire, la déroute de l'Aéropostale en 1931 m'a toujours frappé comme un impair. Auparavant, j'avais accepté la vague version officielle française que Bouilloux-Lafont s'était mis en banqueroute en outrepassant ses ressources dans ses propres intérêts personnels, et que le Gouvernement français avait retiré ses substantielles subventions postales pour des soi-disant détournement de fonds ou pour le, dire clairement une escroquerie.

Mais au cours de mes récentes recherches parmi lesquelles des interviews de " nombreux vieux routiers " au Brésil, en Argentine et ailleurs, il me fut répété que le déroulement des événements fut exactement le contraire : que le Gouvernement français avait retiré la subvention et que l'Aéropostale avait, en conséquence directe, été forcée à la faillite. Incidemment, la dépendance importante à la subvention n'était pas unique Dans les premières années du développement des lignes aériennes, tous les pays, sans exception, ont soutenu leurs lignes par d'importants subsides, soit directement, soit indirectement, au moyen de rétributions postales. Sans subvention, aucune ligne ne pouvait survivre.

L'impression générale qui me fut suggérée auparavant fut que Bouilloux-Lafont était une sorte de requin qui avait utilisé des fonds du Gouvernement français pour renforcer son empire industriel ; que l'Aéropostale était un édifice inconsistant cachant une structure malsaine et que le Gouvernement français, et plus tard Air France, firent à chacun une faveur en ramassant les débris.

Quand un vétéran brésilien me raconta (en image, et presque trop forte pour la vérité de mon interview) " qu'alors que le Gouvernement allemand était totalement derrière le Condor Syndikat, le Gouvernement français était totalement contre l'Aéropostale et la détruisit ", j'ai décidé d'aller plus loin dans mon investigation.

Cette déclaration, même en supposant une exagération possible, fut le début, pour faire le point, du désir de suivre une ligne de recherche, renforcé dans mon subconscient par plusieurs témoignages non sollicités sur le grand travail fait par Bouilloux-Lafont. Beaucoup furent exprimés dans les correspondances des hommes ayant travaillé avec lui, d'autres ont été notés au cours d'interviews. Mais il semblerait que les pionniers comme les prophètes, ne sont pas honorés dans leur propre pays.

En premier, j'ai pris connaissance de chaque référence que J'ai pu trouver sur le sujet de l'odyssée de l'Aéropostale (voir la Bibliographie) sur une catastrophe commerciale d'une telle envergure car l'Aéropostale était en 1930 la plus longue ligne aérienne du Monde. Je pensais découvrir des rapports de défauts de respect d'horaires, de négligence de mesures de sécurité, d'infrastructure déficiente, de sous-estimation, de lourdes dettes vis-à-vis du Gouvernement. Je n'ai rien trouvé de cela : en fait, tout à fait à l'inverse. Aux standards du moment, l'Aéropostale était une ligne modèle. Elle était menée selon de sévères niveaux de sécurité, tenait presque des horaires parfaits ; elle avait investi considérablement en terrains d'aviation, installations au sol et communications radio ; elle modernisait ses avions et ses bateaux (utilisés sur le segment Dakar Natal) avec toute la rapidité possible. Particulièrement, les nouveaux Latécoère 28 qui furent lancés en service tandis que de nouveaux bateaux avaient été commandés pour remplacer ceux loués à la Marine française et elle avait augmenté son capital de 150 % en moins de trois ans.

Je tombais alors sur une référence dans ce grand rapport historique, "The Struggles for Airlines in Latin America " de H. Burden. Ce travail spécifique fut publié par le Comité des Etats-Unis pour les relations Extérieures et de ce fait portait le sceau d'approbation du Département d'Etat Américain. Dans une conclusion sur la chute de l'Aéropostale, il est déclaré : "La Compagnie commença à éprouver des difficultés financières qui furent attribuées aux "rapports parlementaires français sur l'expansion démesurée de ses opérations en Amérique du Sud. En 1931, la subvention du Gouvernement fut supprimée en résultat d'une intrigue politique,"dans laquelle la Direction fût mêlée et la Compagnie tomba en banqueroute. A cause de la crise, le service sur Ascencion fut interrompu, les opérations de l'Aéropostale argentine furent reprises par les Postes argentines et les plans d'expansion furent abandonnés.

Je me hâte d'ajouter que les astérisques sont de mon fait, bien que le témoignage n'en ait pas besoin ; c'est assez dramatique, sans autre fioriture. S'appuyant sur le fait que l'Aéropostale était déjà la plus grande ligne en Amérique du Sud, que pouvaient être alors les plans d'expansion qui furent abandonnés?

 

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